Durant l’enfance, le cerveau humain est extrêmement sensible et établit des connexions pour s’adapter le mieux possible à l’environnement auquel il est exposé. Cette capacité, appelée plasticité, diminue avec l’âge. Le fait de « relancer » la plasticité pourrait être la clé du traitement des maladies neurodégénératives comme de la guérison du cerveau après un traumatisme.
Dans le laboratoire du Dr Étienne de Villers-Sidani au Neuro, les chercheurs étudient les bases de la plasticité cérébrale. Le but de leur travail est d’élaborer des thérapies et des stratégies pour aider les patients qui présentent des troubles neurologiques.
par des chercheurs de ce laboratoire était le premier à montrer que la plasticité cérébrale pouvait être récupérée par la manipulation d’un type de neurone précis dans le cortex auditif de rats.
Les cellules exprimant la parvalbumine (PV+) ont été le sujet de nombreuses études sur la plasticité cérébrale, puisqu’elles influencent le début et la fin de périodes critiques du développement. C’est durant ces périodes que l’organisme est le plus susceptible aux changements dans les connexions neuronales dus à l’environnement. Par ailleurs, les autres études sur le cortex auditif n’étaient pas assez pointues pour préciser le rôle de ces cellules sur la plasticité.
Mike Cisneros-Franco, candidat au doctorat dans le laboratoire du Dr de Villers-Sidani, veut mieux définir le rôle des cellules PV+ dans le cortex auditif, la région du cerveau qui traite les sons.
Grâce à la chimiogénétique, la création de composés qui modifient la façon dont les gènes sont exprimés, il a stoppé le fonctionnement des cellules PV+ chez des rats et enregistré la réaction de leur cortex auditif à des sons de différentes fréquences. Il a ensuite comparé les résultats avec un groupe contrôle de rats dont les cellules PV+ fonctionnaient normalement.
Des neurones du cortex auditif deviennent sensibles à certaines fréquences durant la période où le cerveau est malléable, puis conservent cette capacité lorsque la plasticité cérébrale disparaît. Lorsque les cellules PV+ ont été désactivées, ces neurones sont devenus sensibles à un plus large spectre de fréquences que dans le groupe contrôle, témoignant d’une augmentation de la plasticité. Ces résultats montrent que les cellules PV+ inhibent la plasticité dans le cortex auditif, en agissant un peu comme du ciment qui maintient les apprentissages faits durant les périodes critiques.
Ces résultats révèlent pour la première fois qu’il est possible de modifier la façon dont le cerveau du rat adulte traite les sons en contrôlant l’activité des cellules PV+. Ces cellules sont altérées dans différentes affections, dont les traumatismes crâniens, l’exposition chronique au bruit, l’autisme et la schizophrénie. La stimulation de la plasticité cérébrale par l’inhibition des cellules PV+ chez les humains pourrait être une approche prometteuse pour aider les patients à vivre avec un trouble neurologique ou à récupérer.
« Ce fut vraiment excitant de voir, après à peine quelques minutes de transmission des sons, que l’inhibition des cellules entraînait déjà une augmentation de la plasticité cérébrale, explique Mike Cisneros-Franco. Dans ce cas-ci, la plasticité est survenue durant une expérience passive, mais je m’intéresse davantage à la plasticité en situation d’apprentissage. Nous étudions actuellement la façon dont la manipulation de l’activité des cellules PV+ influence le rythme et la qualité des apprentissages. »
Ìý